Autre fois réservés aux élites musicales, les studios d’enregistrement fleurissent aujourd’hui dans presque chaque quartier de Bukavu. Cette prolifération, fruit de l’engouement croissant pour la musique urbaine et gospel, transforme le paysage musical local.
Entre démocratisation de la production et dérives techniques, la multiplication des studios suscite des débats et interrogation sur l’avenir sonore de la ville de Bukavu. Des producteurs et opérateurs culturels rencontrés montre que cette multiplicité impact sur la qualité des productions locales.
Le manque de professionnalisme et la mauvaise qualité de sons, tel est l’impact de la multiplicité des studios d’enregistrement à Bukavu. Certains producteurs le font, pas par amour pour le métier mais une question de survie, s’indignent certains opérateurs culturels.
Guy Murebwa dit Leopard Beat, responsable du studio GD Record, cette situation studios permet à un nombre élevé d’artistes d’enregistrer leurs projets à moindre cout. Pour lui, il n’y a pas d’artistes sans studio.
Les studios et l’artiste sont pour lui les canaux de transmission des messages que ce soit sociaux, culturels et ou religieux. Néanmoins, il fustige le manque de maturité artistique.
« A Bukavu sont rares les studios qui aident à l’émergence des artistes, la plus part vise l’argent, pourtant ils doivent voir l’artistique », regrette-t-il.
Une croissance fulgurante, mais quel impact ?
Les opérateurs culturels et artistes restent sceptiques. Le nombre croissant des studios d’enregistrement n’apporte aucune plus-value sur la qualité des musiques de Bukavu.
Le responsable du studio d’enregistrement Evoludia Record, M. Virgil Ntibonera, soutient que des artistes se soucient moins de la qualité que du prix. Ceci constitue pour lui, un frein au professionnalisme et à la bonne qualité.
« Il y a une grande différence entre celui qui suit des tutoriels sur la production et mixage de sons et celui qui a étudié dans ce domaine spécifique et qui maitrise l’ingénierie des sons », dit-il.
Néanmoins, Givenn Mbiya, artiste musicien, y voit une opportunité pour des artistes à moyens limités de se produire.
« Plus les espaces d’enregistrement se multiplient, plus on découvre d’autres talents. Des studios qui naissent ici et là contribuent à la visibilité des artistes », martèle-t-il.
Il recommande aux producteurs de se professionnaliser et d’éviter le copié coller dans leurs productions musicales.
Achille Argus, artiste Slameur, prouve que l’intérêt est grand, mais s’interroge sur la qualité et l’expérience. Il perçoit ce phénomène comme une avancée du secteur artistique local, mais le manque de professionnalisme se fait ressentir.
L’avenir de l’industrie musicale locale en jeux
A en croire Thomas Lusango, un opérateur culturel, la qualité des certaines œuvres produites ne permet pas à la musique locale de franchir le rubicon. Il invite les artistes et producteurs au respect des normes.
« Bukavu ne consomme pas Bukavu en matière artistique, ceci par manque de qualité. Il suffit qu’un artiste quitte Bukavu pour se rendre compte de son potentiel », constate cet opérateur culturel.
Il révèle que certains studios choisissent mal les matériels par manque de moyens, un élément essentiel dans la production d’un son de qualité.
Thomas Lusango soutient que la collaboration entre producteurs est un chemin par excellence pour un avancement dans le secteur de la production. Il préconise la création d’une école pour renforcer les capacités de certains producteurs. Ceci pourra, selon lui, aider à l’orientation des artistes dans la production.
David BYADUNIA.